S’il y a une raison qui motive les jeunes garçons peuls à subir la goja (la flagellation) c’est bien sûr le mariage. En effet, la goja est une épreuve où les jeunes garçons essaient de séduire les jeunes filles à travers leur courage, leur bravoure. Dans les sociétés peules très conservatrices, surtout les peuls vivant dans les campagnes, refuser de participer à la goja est une grande honte. Et il sera très difficile pour la personne qui refuse de se faire flageller de trouver une compagne. Alors une fois la flagellation subie par le jeune garçon, quel parcours doit-il suivre afin de se marier ? Comment célèbre t’on le mariage chez les peuls ?
Dans notre article portant sur la goja, nous avons promis de revenir sur ces interrogations. Chose promise, chose due ! Alors aujourd’hui, découvrons le mariage traditionnel chez les peuls du Bénin plus précisément les peuls de Djougou, car la célébration du mariage ne se fait pas de la même façon chez tous les peuls.
Les avances
La rencontre entre un homme ayant subi la goja, donc en âge et en droit de se marier et une jeune fille peut se faire n’importe où. Mais comment reconnaître une jeune fille en âge de se marier ? En milieu peul, la coiffure que porte une fille indique son âge. À 12 ans, la fille peul porte une coiffure appelée jonjoofa. À 15 ans on lui fait la coiffure tutukaare. On rase la tête de la fille des deux côtés en rond puis on lui fait une tresse au milieu. La tresse s’appelle sopudu. Et signifie que la fille à l’âge de recevoir des amants chez elle. A 18 ans on lui fait la coiffure gati. Il s’agit des tresses très fines sur la tête. Une fois le gati tressé, la fille peut commencer par porter des foulards sur sa tête. Le gati signifie qu’elle est pleinement en âge de recevoir des hommes et de se marier.
Alors quand un jeune homme rencontre une fille lors d’une manifestation ou au marché, ou à n’importe quel endroit, et que cette dernière semble l’intéresser, il dit à la jeune fille qu’il lui rendra visite chez elle le soir.
Le soir à 21h le jeune se pointe du côté ouest du domicile de la fille avec de la kola ou du tabac en poudre. Accroupi, il leur souhaite le bonsoir. En disant o kiri djan ? En réalité, c’est une interrogation qui selon la traduction littérale signifie, « passez-vous une bonne soirée ? » A cette interrogation, les parents de la fille comprenant le message, dit à cette dernière : « tu as de la visite ! » La jeune fille va donc accueillir le jeune garçon avec les bonnes manières que sa mère lui aura déjà apprises. La fille prend les colas ou le tabac et l’apportent à ses parents et revient ensuite installer le jeune homme dans une case où il sera entrain de se reposer le temps qu’elle finisse ses travaux ménagers.
Elle revient donc dans la case et discute avec le jeune homme de tout et de rien. Si la jeune fille est intéressée par le jeune homme, ils passent la nuit ensemble dans la case. Dans le cas contraire, elle quitte la case sous prétexte qu’elle veut faire quelque-chose et qu’elle reviendra d’ici peu. Elle va dormir auprès de sa mère et abandonne ainsi le jeune homme seul dans la case où il passera la nuit. Et le lendemain matin, le pauvre homme, malheureux rentre chez lui. Si ce dernier n’est pas découragé, il peut continuer de venir en espérant que la fille s’intéresse à elle.
Mais si la fille passe la nuit avec elle, le lendemain matin, le jeune homme accompagne les parents de la jeune fille aux champs. Il travaille farouchement pour se montrer laborieux auprès des parents de la fille et mange même à peine. Toutefois la fille lui apporte à manger à midi. A l’arrivée de la fille, les parents quittent le champ pour permettre au jeune homme de manger sans aucun complexe. Car la honte et l’honneur sont des éléments essentiels culturellement.
A défaut que la fille apporte à manger au champ, à midi, le jeune homme et les parents de la fille rentre à la maison pour manger et se reposer. Il passe une seconde nuit là et ils peuvent même fixer la date du mariage. Le lendemain, il rentre chez lui. Il dit à ses frères en âge de puberté ce qu’il envisage avec cette fille pour que ses derniers ne tentent rien avec la fille. NB : La fille peut recevoir plusieurs hommes chez elle, mais elle sait qui elle aime.
Le mariage
Il existe deux sortes de mariage traditionnel peul.
- Le mariage normal et honorifique
- et le second mariage que nous appellerons le mariage de la femme volée.
Commençons donc par ce dernier type de mariage.
– Le mariage de la femme volée. Au lieu que les deux amoureux suivent la procédure normale de mariage certains jeunes brûlent les étapes et se marient prématurément. Alors ils se donnent rendez-vous quelques part et le garçon amène la fille chez lui. On dit donc qu’il a volé la fille. A son retour il indique la localisation du campement duquel il l’a ramenée. La famille se concerte et envoie une personne chez les parents de la fille. Ce dernier va et dit: « Nous vous avons volé votre fille. C’est pourquoi nous sommes venus vous informer pour que vous ne vous inquiétiez pas. Votre fille est avec nous. » Alors ensemble, ils essaient de voir s’il n’a aucun problème empêchant le mariage des deux amoureux. Si aucune raison valable n’est évoquée, alors le mariage est célébré suivant la procédure normale.
Certains jeunes s’enfuient souvent avec la fille et vont vivre dans une autre ville.
– Le mariage normal et honorifique : la procédure normale de mariage veut que les parents du jeune homme envoient 25 colas et une somme symbolique de 220 F CFA aux parents de la fille. L’acceptation de des colas et de la somme symbolise leur accord. Une date est ainsi fixée pour la célébration du mariage. Les colas sont distribuées dans les deux familles par la famille de la fille. Le programme du mariage est communiqué aux amis et aux alliés des familles.
Le jour du mariage un cortège de la famille des garçons se muni d’un taurillon, 100 cauris, un pagne traditionnel tissé et un autre pagne multicolore et du lait dans une calebasse. Le pagne et les cauris sont placés dans une calebasse qu’une dame porte sur sa tête. Le cortège se dirige vers le domicile de la fille. La famille de la mariée est censée les voir venir de l’ouest. Alors que le cortège est proche du domicile de la famille de la fille, il annonce son arrivée en disant « salam aleykoum » 4 fois.
Les parents de la fille font semblant de ne rien entendre et ne répondent pas toute suite. Leur silence montre qu’ils sont les propriétaires et qu’ils ont le droit de recevoir ou pas, ceux qu’ils veulent, chez eux . Après un temps, ils envoient une personne pour aller à la rencontre du cortège. Cette personne s’arrête à cinq mètres du cortège et on le salue de nouveau en s’agenouillant. Il répond enfin aux salutations des membres du cortège et leur dit qu’ils sont acceptés dans leur maison. Une cabane est aménagée pour les accueillir. Ils y déchargent leur colis et se dirigent auprès des parents de la fille. A leur arrivée, on leur aura servi à manger, mais ils refuseront de manger avant la célébration du mariage.
La célébration du mariage, se déroule comme suit. Les cauris sont étalés sur un plat tressé en rafia. Puis deux personnes une de chaque coté des deux familles mettent la main dans le plat de cauris. L’un d’entre eux dit en langue peule « j’unis X et Y selon la loi, que Dieu fasse que l’amour règne dans leur couple qu’ils aient le bonheur et beaucoup d’enfants. Etes-vous témoins ? « . Ces phrases sont répétées 4 fois. Les autres répondent : Men seedake qui veut dire, « oui, nous sommes témoins« . Puis on délaie la bouillie avec du lait et on en donne une gorgée à boire à ceux qui sont présents en passant du plus âgé au plus jeune. On égorge ensuite le taurillon, les parents du garçon prennent la moitié de la viande sans les entrailles et rentre chez eux. Chaque famille fête chez elle.
Notons que ni le garçon, ni la fille n’assistent aux festivités du mariage et ne mangent la nourriture et la viande des cérémonies. La fille qui était réfugiée entre temps dans une autre maison regagne le domicile de ces parents quelques jours après la célébration du mariage. Et pour finir, ces belles sœurs viennent la chercher pour l’amener chez son mari .
Note : Cet article, le texte ainsi que les photos marquées d’un copyright sont la propriété exclusive de Visiter le Bénin. En réutilisant ce contenu sans accord, vous vous exposez à des poursuites. Merci de nous contacter, pour toute utilisation.
Si vous avez aimé ce que vous avez lu (et seulement si vous avez aimé la qualité de l’article), vous êtes libre de nous laisser un LIKE ou un commentaire d’encouragement. Cela nous fera vraiment chaud au cœur et nous encouragera dans la parution d’articles toujours plus informatifs et utiles.
Si vous le souhaitez, vous pouvez accéder à plus de nos articles :
Vous cherchez un sujet précis ? Il y a actuellement autour de 100 articles. Dans ce cas, passez par : > Notre sélection d’articles par catégories <
Vous souhaitez trouver un article en dehors de cette petite sélection ? Consultez l’ensemble de nos articles : > Voir l’ensemble des articles <
Vous êtes également libres d’accéder à notre Page Facebook et notre Groupe Privé.