Aaaah le gari … ! Quand l’on évoque la gastronomie africaine, en particulier en Afrique de l’Ouest, chaque contrée a sa spécialité, sa particularité. Ainsi nous avons par exemple au Sénégal le fameux « Tiep », en Côte-d’Ivoire le célébrissime « Atiéké », ou encore le très connu « Foufou » au Nigéria. Au Bénin, plusieurs mets sont indissociables du pays. En effet, plusieurs plats sont particulièrement bien appréciés aussi bien des autochtones que des visiteurs. Parmi ces plats « Made in Benin », nous retrouvons le « Gari ».
Il est vraiment difficile d’imaginer un Béninois – du moins un Béninois vivant au Bénin – qui ne connaîtrait pas le Gari.
Le « Gari » est issu de la transformation du manioc en farine. Il entre dans la composition de plusieurs plats, d’où sa consommation sous de multiples formes. Manœuvres, artisans, élèves, étudiants, artistes, marchands, fonctionnaires le consomment régulièrement et souvent sans modération. De plus au-delà des frontières du Bénin, la consommation du Gari s’est démocratisée au point d’entrer dans les habitudes alimentaires de certains pays, comme le Nigeria.
De la production à la transformation
Le gari est une semoule du manioc qui est produit au sud du Bénin et beaucoup plus dans le centre du pays, principalement dans les Collines. Cette région est très célèbre d’ailleurs, pour sa productivité à grande échelle du gari et d’autres produits alimentaires dérivés du manioc. La culture agricole du manioc est primordiale dans la production du gari. Malheureusement depuis plusieurs années, la culture du manioc est en régression, ce qui a un impact considérable sur la production du gari.
La production du gari est toujours à un stade de production artisanal au Bénin. En effet, de la production à la transformation, le gari est obtenu avec des moyens rudimentaires. Dame Houéfa, une des nombreuses femmes productrices explique que la transformation du gari est un héritage traditionnel se transmettant de mère en fille. Cependant, il existe des unités de production du gari qui disposent d’un matériel de production constitué du bac de lavage, de la râpeuse, de la presse, du séchoir et de la table de fabrication.
Le matériel de production du gari
Comme cité précédemment le matériel de production du gari est un matériel artisanal et désuet. Dans la région des Collines au Bénin, la production de la farine de manioc ne nécessite pas des machines. Car, le simple matériel de cuisine est suffisant pour effectuer le travail de production.
Cependant, grâce à plusieurs associations d’aide aux producteurs de gari, de plus en plus nombreuses, des moyens sont mis à disposition des femmes productrices afin de les équiper d’un matériel de production, certes rudimentaire mais facilitant la production. Ainsi, il n’est pas rare de croiser dans des unités de production de gari, une table spécifique de fabrication et d’autres matériaux entrant dans le cycle de la production tels que : les presses, les séchoirs, les bacs de lavages, les râpeuses etc.
De la collecte au tri
Une fois récolté, le manioc ou plus précisément les racines du manioc sont collectées en tas dans des lieux rendant leur accès facile. Il s’en suit le processus de tri. L’objectif du tri consiste à séparer les bonnes racines, aptes pour la transformation, des mauvaises racines de manioc. Grace aux paniers le plus souvent en osier ou de cuvettes, les racines de manioc aptes à la transformation sont ainsi acheminées vers les lieux de productions. Enfin, la fin de cette étape est matérialisée par le pesage des racines de manioc. L’organisation et le succès de cette étape est fondamentale dans la suite de la production et de la transformation du Gari.
Stade de l’épluchage et du lavage
Après la pesée, le manioc, à l’aide du couteau pour les uns et d’éplucheuse pour les autres, est épluché. Ainsi la peau de couverture qui recouvre le manioc est enlevée (cette peau servira plus tard de nourriture pour le bétail). Dame Houéfa insiste sur l’importance de la main d’œuvre à ce stade, qui est assumée majoritairement par des femmes. Vient ensuite après l’épluchage, le lavage. Le lavage du manioc après épluchage se fait plusieurs fois à grandes eaux, afin d’éliminer toute bavure et salissure.
Découpage-Râpage- Broyage
Le manioc épluché est ensuite morcelé puis broyé. Pour réussir cette étape il est souvent recommandé d’avoir des broyeurs ou des râpes. Il existe aussi des broyeurs et râpes de productions artisanales, beaucoup plus accessibles, niveau prix.
Pressage et Séchage
Après le broyage, une productrice Geneviève explique que la chair obtenue est insérée dans sacs propres, en polypropylène qui sont par la suite pressés à l’aide du cric hydraulique ou de la presse manuelle. Elle continue en indiquant que l’objectif à ce niveau est de retirer tout surplus d’eau, qui est néfaste à la transformation.
La chair pressée ainsi obtenue est étalée et exposée à l’air libre au soleil après avoir été émiettée à la main. La durée de ce séchage est relativement longue et n’est pas toujours hygiénique. L’autre alternative de séchage est le séchoir ventilé à air chaud. Ce dernier est plus indiqué et garanti une sécurité d’hygiène. Pour obtenir un produit de bonne qualité et surtout respecter l’environnement, il est recommandé d’utiliser comme énergie à cette étape du gaz ou de l’électricité. Malheureusement disposant de peu de moyens, les producteurs font très souvent recours au bois et au charbon. La réussite de cette étape dépend également du taux d’humidité résiduelle qui impérativement doit être de 12 ou 13%.
Le broyage et tamisage
Le manioc désormais sec est de nouveau soumis à un deuxième broyage. Cette fois-ci il s’effectue à l’aide d’un broyeur à marteau, la plupart du temps. Afin d’être homogénéisé et être plus fin, après broyage, on soumet le produit obtenu au tamisage. Le gari est désormais prêt. Il peut s’en suivre l’emballage qui est précédé de la pesée du gari. L’emballage se fait dans des sachets qui sont ensuite stockés dans des cartons. Il est important de conserver le gari obtenu dans un endroit frais, aéré et sec.
Le gari au quotidien
À la base, plusieurs le gari serait un moyen de conserver le plus longtemps possible le manioc. Le manioc désormais transformé en gari peut être utilisé dans les pâtisseries et dans les boulangeries de Cotonou, Porto-Novo ou d’autres villes. On s’en servira pour produire des pains, des gâteaux, des crêpes, des cakes, etc. De même le gari peut également entrer dans la composition des biscuits, dans l’industrie alimentaire ou non et dans la préparation culinaire pour obtenir par exemple du piron, de la sauce, etc.
Par ailleurs le gari peut être également directement consommé avec de l’eau. C’est le délayage. Il est souvent accompagné du sucre ou encore de l’arachide. Le délayage est très prisé au Bénin à travers toutes les couches sociales. Il existe selon, Christian étudiant en Sciences Juridiques à l’université d’Abomey-Calavi, une association regroupant les étudiants “délayeurs”.
Les femmes et le gari
Le niveau de l’implication des femmes dans la production, la production et même la commercialisation du gari est très élevé. En effet elles sont les premiers acteurs de ce secteur. Selon plusieurs femmes, rencontrées, après la récolte où l’on retrouve des hommes, c’est les femmes qui effectuent le reste de la tâche à plus de 70%. Les femmes disposent souvent de peu de moyens financiers et sont souvent aidées par leur famille et entourage.
Au stade de la commercialisation, on retrouve également les femmes dans les marchés pour écouler le gari.
Les problèmes et difficultés
De la production à la commercialisation, le secteur du gari au Bénin rencontre plusieurs difficultés. Dossi, une productrice du gari affirme : « Le manioc se fait de plus en plus rare, car les productions et la fertilité des sols ne sont plus ce qu’elles étaient il y a quelques années. Ce qui diminue considérablement nos productions annuelles et réduit nos revenus. »
De même, le matériel de production souvent artisanal réduit la marge de manœuvre et augmente la difficulté de production. Les jeunes des milieux ruraux sont de plus en plus désintéressés par la production du gari. Ce qui réduit considérablement la main-d’œuvre.
Enfin, la commercialisation du gari demeure toujours problématique. Dans la commune de Dassa-Zoume, carrefour majeur du commerce du gari, les acteurs du gari se plaignent d’une commercialisation de plus en plus alambiquée, et qui de facto occasionne une baisse considérable de leurs revenus.
Une des conséquences peut être une fluctuation des prix et l’augmentation du prix du gari pour le consommateur. Pour donner une idée : le prix peut varier de 150 F CFA à 400 F CFA le kg.
Il est à noter que le gari existe en plusieurs qualités. A vous de vous renseigner et d’identifier l’utilisation que vous voulez en faire.
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